Abdelhamid Boudaoud, président du CNEA : Abdelhamid Boudaoud, président du Collège Nationale des Experts architectes Algériens ( CNEA) « Nous avons les meilleurs lois au monde, il ne reste qu’à les appliquer avec rigueur »

 

Abdelhamid Boudaoud, président du Collège Nationale des Experts architectes Algériens ( CNEA)

« Nous avons les meilleurs lois au monde, il ne reste qu’à les appliquer avec rigueur »

 

       Le Chantier-dz: Monsieur Boudaoud, Vous avez, longtemps, pointé du doigt la non-application des lois en termes de respect des règles d’architecture et d’urbanisme. Pensez-vous que les choses s’améliorent ces derniers temps ?

 

Abdelhamid Boudaoud : Le respect des normes d’architecture et d’urbanisme laisse toujours à désirer, parce que nous n’avons pas d’entreprises capables de réaliser en quantité et avec le respect des normes architecturales. Et aussi, nous n’avons pas des organismes qui peuvent assurer un suivi rigoureux et continu des projets, soit pour un manque de moyens, ou par laxisme notamment de la part des président d’assemblées populaires communales (APC). Beaucoup reste à faire en termes de sensibilisation afin d’atteindre le niveau escompté, un travail de longue haleine doit être encore fait dans ce sens.

 

Pour l’architecte, il y a un contrat de suivi et de contrôle. Est-ce que ce dernier effectue convenablement sa tâche ?

 

Abdelhamid Boudaoud : Il est vrai que l’architecte a un contrat de suivi et il y a même le bureau de génie civil qui intervient dans cet aspect. Toutefois, par manque de moyens ou par incompétence, le contrôle et suivi des projets de construction fait toujours défaut. Lorsque l’environnement général est caractérisé par la non-application rigoureuse des lois en matière d’architecture et d’urbanisme, toutes les parties intervenantes observent un certain manque de discipline. La question est, donc, beaucoup plus compliquée que d’incomber la responsabilité à l’architecte ou à l’ingénieur en génie civile. J’ai toujours dit que nous avons les meilleurs lois au monde. Malheureusement, nous n’avons pas les personnes qui savent appliquer ces lois. Par exemple une commune qui veut réaliser 100 logements, sachant que la loi dit que chaque commune doit avoir un Plan d’occupation de sol (POS), selon la loi 90-29, l’article 34, sachant que la responsabilité incombe au président d’APC, pourquoi ne pas appliquer, et qu’attendent les élus locaux pour accomplir leurs tâches et responsabilités?

 

 

 

   Ne pensez-vous pas que la contrainte des délais de réalisation joue un rôle négatif dans ce sens ?

 

Abdelhamid Boudaoud : Là-aussi, puisque le président d’APC accepte la réalisation d’un nombre de logements dans sa commune, il doit aussi accepter les délais de réalisation. Il doit aussi dire son mot par rapport aux délais, et il doit aussi y avoir un cahier de charges bien précis à respecter.

Que faudrait-il selon vous pour amener les autorités à donner plus d’importance à l’application des lois en vigueur ?

 

Abdelhamid Boudaoud : D’abord, il faudra former nos entreprises de réalisation, et aussi encourager les architectes dans le paiement de leurs honoraires. L’honoraire de l’architecte est fixé à 3% du coût global des logements réalisés. Par exemple, on dit que deux cent logements valent 200 000 dinars, 3% ce sont les honoraires de l’architecte en ce qui concerne l’étude. Le suivi et contrôle c’est autre chose…il faut motiver davantage les architectes. Aussi, dans les appels d’offre, il est temps de mettre un terme à la logique du « moins disant », car une entreprise qui demande moins d’argent, réalisera certainement des logements de moindre qualité !

 

En plus des architectes, il y a aussi le rôle de l’ingénieur en génie civile et même le géologue…

 

Abdelhamid Boudaoud : Je dirai plus loin que cela, il y a le rôle de l’hydrogéologue qui est d’une importance capitale.  Dernièrement j’ai eu une expertise de 2248 logements, une partie est touchée par l’eau ! Aussi, le cas de Mila en est un bel exemple…., si on a fait l’étude d’hydrogéologie, on ne serait pas arrivé au stade d la chute de constructions récentes…. Aussi, les gens construisent avec des poteaux de R 1, des R 4, R 5,  et avec cela, si demain il devrait y avoir un séisme, les dégâts seraient colossaux. J’ai constaté même à Alger des poteaux de quatre barre de 12 mm pour un R 4…c’est le danger certain !

 

Dans nos bâtisses, il y a aussi l’aspect extérieur qui laisse à désirer….des façades multicolores, aucune synergie. Votre commentaire ?

 

Abdelhamid Boudaoud : Ici aussi, un travail doit être fait et les lois en vigueur doivent être appliquées afin de donner à nos villes et cités l’aspect extérieur homogène et un urbanisme organisé….  Là-aussi,  il s’agit de la responsabilité du président de l’APC de veiller au respect du cachet urbanistique des cités et villes qui dépendent de sa commune.

La loi 08-15 est claire dans ce sens, et il y a aussi le décret 159 qui dit que le président d’APC ou le wali doivent passer et demander le plan à ceux qui sont en train de construire, et vérifier s’il est conforme ou pas. Il faut une refonte profonde des choses, et je suis optimiste qu’à l’avenir avec la réaction positive des citoyens et des autorités publiques…. Je recommande à ce que l’architecte passe par le niveau de commune, et après sa réussite, il passe au niveau de wilaya et ensuite au niveau national, selon ses compétences…

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                                                                                                                                                                                 A.H

 

« Par manque de moyens ou par incompétence, le contrôle et suivi des projets de construction fait toujours défaut. Lorsque l’environnement général est caractérisé par la non-application rigoureuse des lois en matière d’architecture et d’urbanisme, toutes les parties intervenantes observent un certain manque de discipline »

« Le rôle de l’hydrogéologue est d’une importance capitale. Il faut absolument impliquer les hydrogéologues dans l’étude d’avant le lancement d’un projet de construction.   Ici,  le cas de Mila en est un bel exemple, car  si on a fait l’étude d’hydrogéologie, on ne serait pas arrivé au stade d la chute de constructions récentes ».

 

 

 

 

 

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